Comment décarboner les industries sans abîmer la nature ? Le débat est « électrique » en Camargue. Pour verdir le port de Fos-sur-Mer, le gestionnaire de transport d’électricité RTE a décidé de créer une ligne à très haute tension. Mais elle va traverser la plus grande zone humide de France.

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Des oppositions très fortes et un contre-projet

Ici, agriculteurs et défenseurs de la biodiversité sont main dans la main contre cette ligne. C’est rare un projet qui suscite autant de virulence.
Un peu plus au sud, tout près des marais, Hélène Michel nous reçoit au Mas de Valériole. Autour de sa maison aux volets bleus, elle cultive des vignes et du riz bio. Elle se dit « terrassée » par cette annonce qui risque de nuire à son activité et à l’œnotourisme. « En étant dans un endroit aussi préservé, pourquoi choisir de détruire le peu qui reste encore sur ce littoral méditerranéen, se demande-t-elle, qui plus est dans un parc naturel régional, et on vient choisir cet endroit pour une ligne à très haute tension, on se fait beaucoup de souci. »

Le biologiste Jean-Laurent Lucchesi, du collectif « Stop THT » est très inquiet pour les 400 espèces d’oiseaux qui dépendent de la Camargue. « Cette zone est exceptionnelle, c’est une zone de reproduction, de migration, d’hivernage, et certaines espèces sont particulièrement menacées« , détaille-t-il. En 2024, deux femelles d’aigles de Bonelli sont mortes sur les lignes à haute tension et il ne reste que quelques couples dans le sud de la France.

Or, ce collectif a trouvé une solution : enterrer une partie de cette ligne à haute tension. « Il existe des terrains qui appartiennent à l’État ou aux collectivités locales, des bords de route, vers le Rhône, qui permettent d’enfouir la ligne », s’insurge-t-il. Car le collectif n’est pas opposé à la décarbonation. Mais en face, RTE répond que l’enfouissement de la ligne coûterait 10 fois plus cher et ne permettrait pas de tenir les délais demandés. Jean-Luc Moya, le porte-parole des opposants, craint que la tension ne monte encore d’un cran. « Nous redoutons que l’État et RTE passent en force, ce serait perdant-perdant« , ajoute-t-il.

Alors faut-il privilégier une décarbonation à marche forcée, au mépris de la biodiversité ? Le débat n’est pas clos, alors que la déclaration d’utilité publique doit être déposée cette année, les associations menacent déjà de saisir la justice.

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